Passoires thermiques : fallait-il vraiment les interdire ?

Depuis le 1er janvier 2025, la location des logements classés G au diagnostic de performance énergétique est interdite en France. Alors que la France fait face à une véritable crise du logement, cette interdiction pose une question de timing et les conséquences sociales et économiques de cette mesure appellent à un examen approfondi. Une tribune proposée par Charles Becquet, Directeur Général de Locservice.fr.

Une mesure ambitieuse mais contre-productive 

Si la loi reste inchangée, ce seront tous les logements G, F et E qui seront interdits à la location d’ici 2034. Début 2024, près de 38 % des biens du parc locatif privé étaient dans l’une de ces trois notes, et 6,9 % étaient encore en G (source), soit environ 567 000 logements (source). Tous ces biens auront-ils été rénovés dans 9 ans ? La question semble presque rhétorique. 

Malgré un calendrier annoncé dès 2021, beaucoup de propriétaires peinent à suivre le rythme. Les aides, qui ont le mérite d’exister, semblent encore insuffisantes pour que les ménages modestes ou les petits propriétaires puissent entreprendre les travaux de rénovation demandés dans le temps imparti.

Beaucoup de logements non conformes risquent ainsi d’être retirés du marché locatif. Selon un sondage LocService de février 2025, environ 70 % des bailleurs de logements G ne prévoient pas de le rénover et 23 % veulent même vendre. A l’heure où le marché locatif français bat des records de tension, ces interdictions paraissent déconnectées de la réalité.

Les freins à la rénovation énergétique n’ont pas été levés

Malgré les incitations financières mises en place pour les bailleurs souhaitant rénover leurs biens, plusieurs obstacles empêchent une mise en conformité rapide et efficace des logements les plus énergivores.

Le principal concerne le coût des travaux qui reste trop élevé pour nombre de propriétaires. En janvier 2025, une étude de la FNAIM dévoilait que le coût moyen d’une rénovation énergétique totale avoisine les 40 000 € par logement. Un montant prohibitif pour beaucoup.

Par ailleurs, la complexité des démarches est toujours perçue comme excessive, qu’il s’agisse de l’accès aux aides ou bien de la mise en œuvre des travaux qui peuvent être retardés ou bloqués par la copropriété, la mairie, les Bâtiments de France, etc.

Le marché manque aussi d’artisans qualifiés pour réaliser ces travaux. La pénurie de main-d’œuvre ralentit considérablement le rythme des rénovations, sans perspectives d’amélioration puisque la formation et le recrutement des professionnels nécessaires posera problème pendant plusieurs années (source Insee).

Enfin, la fiabilité du DPE reste contestée malgré sa réforme en 2021, pour ses incohérences ou son manque de précision. Pourquoi investir dans des travaux si leur évaluation est incertaine ?

Quelles alternatives pour concilier écologie et justice sociale ?

Plutôt que d’assister à une énième interdiction contre-productive face à ce défi, pourquoi ne pas imaginer d’autres pistes permettant de concilier l’ambition écologique et l’accès au logement des locataires :

  • Un plafonnement des loyers spécifique aux passoires thermiques : moins contraignante, cette mesure inciterait les propriétaires à réaliser des travaux sans pour autant exclure le bien du marché. En attendant, les locataires bénéficieraient d’un loyer réduit leur permettant d’assumer plus facilement les dépenses énergétiques.
  • La création d’un fonds régional dédié aux copropriétés : inspiré du modèle alsacien lancé en 2022, il pourrait financer directement les rénovations collectives dans les immeubles anciens où les blocages sont fréquents, en complément des aides de l’ANAH.
  • Un plan national pour former des artisans qualifiés : via un “plan Marshall” du BTP pour renforcer l’attractivité des métiers du bâtiment et répondre à la pénurie de main d’œuvre pour accélérer de façon significative le rythme des rénovations tout en maîtrisant leur coût.
  • Une simplification administrative et de la pédagogie : à l’instar du “choc de simplification” qui a accompagné la reconstruction de Notre-Dame de Paris ou les projets ambitieux d’investissement dans l’IA, il est temps d’offrir un cadre administratif clair et allégé aux propriétaires pour la mise en oeuvre de leurs travaux de rénovation, et d’apporter plus de pédagogie pour faciliter la connaissance et l’accès aux aides de l’état.

L’idée n’est évidemment pas d’abandonner l’objectif écologique : les passoires thermiques doivent être rénovées afin que leurs occupants puissent vivre dans de meilleures conditions tout en réduisant leur empreinte carbone. Mais face à une crise du logement qui s’aggrave chaque année, comment ne pas convenir de l’importance de repenser l’application de cette interdiction ?

En conciliant ambition environnementale et pragmatisme économique, la France peut transformer cette nouvelle contrainte réglementaire en opportunité pour moderniser son parc immobilier tout en répondant aux besoins vitaux de ses citoyens.

ℹ️ Vous proposez un logement à louer ? N’oubliez pas que LocService.fr peut vous aider à trouver gratuitement vos futurs locataires ! Cliquez ici


Crédit image en-tête : Freepik

1 évaluations (moyenne de 5,00 / 5)
1 vote, average: 5,00 out of 51 vote, average: 5,00 out of 51 vote, average: 5,00 out of 51 vote, average: 5,00 out of 51 vote, average: 5,00 out of 5
Loading...

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

22 réflexions sur “Passoires thermiques : fallait-il vraiment les interdire ?”

  1. Aujourd’hui, face aux nouvelles règles sur la rénovation énergétique, il est important d’accompagner les propriétaires avec des explications simples et claires. Le diagnostic immobilier joue un rôle clé pour mieux comprendre l’état de son logement et connaître les aides disponibles. L’objectif est de rénover pour vivre dans un logement plus confortable, tout en respectant l’environnement. En rendant ces démarches plus compréhensibles, on peut transformer cette obligation en une vraie opportunité pour améliorer le cadre de vie à Paris

  2. Je serais d’accord pour :
    Un plafonnement des loyers spécifique aux passoires thermiques : moins contraignante, cette mesure inciterait les propriétaires à réaliser des travaux sans pour autant exclure le bien du marché. En attendant, les locataires bénéficieraient d’un loyer réduit leur permettant d’assumer plus facilement les dépenses énergétiques.

  3. Jean Claude Parisio

    Beaucoup de bon sens dans cet article ! Surtout faciliter l’accès aux aides dont on ignore parfois l’existence et simplifier leur octroi. Et ne pas oublier les SCI ! Bon nombre de propriétaires ont investi par l’intermédiaire de ces sociétés qui sont souvent exclues des aides, MaPrimeRenov en particulier.

  4. J ai un studio en location mais la copropriété ne veut pas faire l isolation thermique et nous demande de la faire par l intérieur d ou refaire son appartement et métrés carrés en moins pas top sur une petite surface

  5. Bonjour,
    Je viens de lire votre article et comme toujours je suis stupéfaite de la bêtise française on fait un pas en avant puis deux en arrière et on ne sait plus sur quel pied danser !!! l’écologie est le maître mot de ce monde alors que les rayons des super marchés sont remplis de s…….. que la plupart des locataires achètent et mangent, car s’ils n’ont pas la possibilité d’être propriétaires ils n’ont pas non plus accès aux produits bios …. mais cela ne gêne personne ! les fautifs sont les méchants propriétaires !!! et personne ne parle du coût exorbitant de l’électricité, du gaz , du mazout et de l’essence peut être que la baisse du prix de tous ces produits permettraient à la plupart des gens de vivre mieux !!!!
    D’ autre part on impose des DPE aux tarifs très élevés pour se rendre compte qu’ils ne sont pas fiables !!! ou que l’on peut monétiser !!!!
    Les gens ne pourront plus se loger et le gouvernement ou les écologistes privés ouvriront leurs demeures pour abriter tout ce monde …. car entre les DPE , les loyers impayés et les squatteurs il n’y aura bientôt plus de propriétaires bailleurs !!!
    Qu’en pensez vous ??? Et surtout combien d’écolos ont des locataires avec un DPE A ???

  6. Il y a une absence de bon sens et de moyens dans la classification des passoires thermiques. Ceux qui ont été confrontés aux DPE le savent.
    Toutefois l’utilisation de moyens simples et gratuits de calcul de la consommation par implication légale des fournisseurs d’énergie traduiraient une consommation réelle (et non primaire ou secondaire, ces dernières qualifications rendant ignorants autant les consommateurs que les bailleurs).
    D’autre part les préposés à la délivrance de la prim-rénov ne sont pas des professionnels du bâtiment pour la plupart et font confiance aux artisans privilégiés qui bénéficient de l’agrément de l’adème et autres certifications attribuées contre cotisation. Ce qui fait augmenter derechef la facture des travaux.
    Il est possible d’économiser entre 15% et 30% sur le prix de revientven abandonnant tout ce fatras administratif voire plus si les bailleurs privés sont autorisés à effectuer eux même des travaux des travaux. Seule contrainte obtenir le label qualité délivré par des organismes de contrôle ayant pignon sur rue depuis des décennies tels que Véritas, Socotec, et leurs confrères.

  7. l e diagnostique est mal pensé car si vous avez dejà pour commencer un locataire qui chauffe à 25° ou plus ca fait partie evidemment de la consommation si il y a 2 douches par personne par jour, si un lavage de linge avec la machine tous les 2 jours plus séchage avec seche linge tout ça fait partie aussi de la consommation electrique et ne concerne pas la soit dis en l’isolation

  8. Bonjour,
    Je suis propriétaire de maisons de ville hérités des grands parents de mon épouse.
    Depuis 1992, j’ai pu rénover, isoler et rendre confortables ces habitations en faisant réaliser progressivement les travaux par des artisans fidèles. Chaque tranche réalisée donne droit à une déduction venant minorer les bénéfices fonciers lors des déclarations d’impôts annuelles.
    Certes, le rendement est très faible mais tous ces travaux d’amélioration ont valorisé le capital immobilier. Autre avantage, je suis à l’écoute de mes locataires qui savent parfaitement que leurs besoins sont satisfaits dans les meilleurs délais possibles.
    Le résultat est qu’ils entretiennent parfaitement leur intérieur et ne souhaitent pas changer d’adresse. Pour preuve de leur fidélité: deux d’entre eux sont toujours dans leur maison après 13 et 24 années de location.
    Je constate autour de moi que beaucoup de petits ou gros propriétaires se contentent d’encaisser des loyers sans jamais réaliser de travaux d’amélioration. Lorsque les logements sont dégradés par l’usure dans le temps ils n’ont pas les moyens de réaliser de gros travaux de rénovation, ayant dilapidé les loyers perçus entre temps. Ce n’est pas une gestion de père de famille.

  9. Un propriétaire qui cumulent des loyers impayés de ses ses locataires et ne peut jamais récupérer son argent se trouve systématiquement dans l´impossibilité de faire des travaux. Même un jugements qui condamne le locataire à régler ses arriérés reste inapplicable si le locataire est insolvable. Toujours plus de protections aux locataires mal saints et de pression sur les propriétaires.

  10. Non paiement des loyers et dégradation des logements par une immigration qui se moque des lois et qui reste impunie face à des juges idéologiques. Action douteuse des services sociaux départementaux qui favorisent par le biais des lois squat, trêve hivernale… le locataire indélicat.
    Voilà aussi des raisons jamais évoquées qui font que les propriétaires n’en peuvent plus.

  11. je crois que l ecologie de gauche est completement destructrice de valeur .
    Il faut un juste milieu entre economie et ecologie et malheureusement madame TONNELIER ne la connais pas

  12. votre article est tres realiste
    je suis proprietaire de plusieurs maisons anciennes construites en pierre avec un toit en petites tuiles de pays, j ai isole par l interieur lors de la renovation en 2010 le cout a ete de 400.000 euros
    aujourdhui les diagnostiqueurs ne sont pas en mesure de faire une analyse serieuse .
    Si ces maisons etaient des passoires thermiques, je pense que je n aurais pas de locataire car le chauffage couterait trop cher .
    Je ne comprends pas pourquoi on ne laisse pas le marche libre, se reguler seul .
    Je demande que les deputes restent chez eux et fassent autre chose que de nous empecher de travailler .

  13. Comme toujours nos gouvernants sont hors sol.
    Lorsque nous aurons réhabilité nos logements de G à C seule réhabilitation proposées actuellement par les entreprises compte tenu des couts, et des possibilitées techniques, quelles propositions seront mises en avant par le gouvernement?
    Passer de C en D Alors même qu’aujourd’hui aucune entreprise ne propose de passer de G ou F en A ou B.
    ABSURDITÉ du gouvernement.

  14. La France a tout faux sur ce dossier… Coercicion, intrusion, matraquage administratif, tous les abus de pouvoir se retrouvent sur ce dossier.

    Les propriétaires n’ont que faire des incantations idéologiques des soi-disant écolos !

    Pourquoi ne pas laisser l’offre et la demande faire leur effet ? Les locataires soucieux de sobriété énergétique iront vers les logements les plus performants, naturellement. Le marché fait très bien son travail, mais non, le gouvernement français préfère faire la leçon à tout le monde !

    Les français en ont marre de se faire emmerder !

  15. Isabelle Pastorino

    Le DPE a été rénové mais très mal, un cumulus 200 l pour un petit appartement consomme autant qu’un cumulus 200l d’une maison plus grande, il faudrait le retirer du calcul final pour tous les logements et ne compter qu’une différence pour les plus gros.
    Deux appartements absolument identiques, dans le même immeuble, ont un diagnostic différent parce que l’un fait 39m² et l’autre a un placard de plus, il fait 42m². Il faudrait pouvoir pondérer au niveau du diagnostiqueur ou du logiciel.
    Il est demandé des factures pour les travaux, mais si on ne les a pas gardées (isolation de plus de 10 ans), les photos des travaux qui montrent bien les matériaux utilisés ne sont pas prises en compte. Pourquoi ? Du coup le diagnostic est faux, mais l’état s’en contente au détriment du propriétaire qui a agi en amont de la loi.
    Quelqu’un qui change ses fenêtres pour du double vitrage ne voit aucune différence ou une aggravation par rapport à l’ancien diagnostic, comme si l’argent avait été investi pour rien.
    Une VMC simple flux qui empêche les moisissures, aggrave le diagnostic, pourquoi continuer à en vendre ?
    On dirait que tout est fait sans réflexion d’ensemble, un jour c’est comme ci, un jour c’est comme ça. Et les aides sont tellement compliquées à demander et obtenir, que la plupart des gens renoncent à faire des travaux.
    A l’ère de l’informatique et du téléphone, il me semble que ça devrait être plus simple de pouvoir se renseigner et suivre ensuite les démarches dans l’ordre…

  16. Après avoir installé une VMC, double-vitrage, volets neufs en bois (site protégé), isolation par le plafond, mon logement classé E est passé catégorie G!
    Petite surface (12m²) il n’est pas possible d’effectuer une isolation intérieure
    Les étudiants qui l’occupent ne sont pas là le week-end et pourtant cela leur rend bien service

  17. Jean-Louis TROTTET

    Oh la bonne idée de plafonner les loyers !!!!!!! En plus on pourrait doubler la taxe foncière!!!!!
    Inventer une « taxe propriétaire non occupant » !!!! Interdire de clôturer un bail sous aucun prétexte
    Supprimer la revalorisation des loyers!!!!! Et encore plein de c…… à votre disposition !!!!
    De la sorte il n’y aura plus de logements à louer, donc plus de problèmes avec ces s….de propriétaires
    Bien amicalement
    de la part d’un propriétaire qui aura bientôt tout vendu…..!!!!

    1. L’idée était d’imaginer des alternatives moins pires que l’interdiction pure et dure, tout en continuant d’inciter les bailleurs à faire des travaux. Il vaut mieux continuer de percevoir un loyer, même s’il n’est pas aussi élevé qu’on le souhaiterait, plutôt que rien du tout…

  18. ELISABETH MME MAILLOCHON

    Bonjour,
    Je vous remercie pour votre article plein de bon sens au sujet de la rénovation énergétique des logements. Les bailleurs privés sont complètement démotivés par la situation actuelle.
    – Pour réaliser des travaux c’est très compliqué: Les bons artisans ont des planning complets sur minimum 18 mois, et les autres donnent plus ou moins satisfaction quand ils ne vous apportent pas des soucis supplémentaires (expl mon fils a versé un acompte pour réfection d’une toiture suite grêle et les travaux n’ont jamais été réalisés)
    – Les demandes de subvention pour l’économie d’énergie relèvent de l’absurde! Heureusement qu’on nous parle de la simplification administrative! L’angoisse vous prend rien que de l’envisager!
    – Les revenus des bailleurs privés sont aussi particulièrement imposés.
    – Ils sont également de plus en plus victimes de l’ambiance de la société qui se dégrade, impayés de loyers, dégradations, faux documents etc.
    – Je ne pense pas que les bailleurs sociaux soient interdits de louer des passoirs énergétiques!
    – Et puis l’écologie sur le dos de l’immobilier est absurde même si je suis complètement d’accord pour que les locataires qui paient un loyer doivent être respectés et vivre décemment. Mais croyez-vous qu’une personne âgée qui utilise sa chaudière à fioul 6 mois de l’année (pas plus car avec le réchauffement climatique je n’ai déjà plus de chauffage) mais se déplace très peu, et surtout pas en avion, a une empreinte carbone pire que tous ceux qui font le tour de la planète plusieurs fois par an uniquement pour aller se faire bronzer dans des usines à touristes à 10 000 km. Le surtourisme et les transports en tous genres pour livrer des paquets achetés sur internet, ne sont pas dans le collimateur car il faut préserver la croissance et l’emploi c’est pour cela que d’imposer des travaux dans les logements va dans le bon sens!
    Merci de m’avoir permis de m’exprimer, je vous renouvelle mes remerciements et vous adresse mes très cordiales salutations,

  19. Très bonne analyse.
    Je suis tout à fait d’accord concernant la fiabilité du DPE: je viens de faire réaliser le DPE dans deux appartements type F3, classés « D ». Au regard de la consommation tout électrique (y compris chauffage), je trouve un classement « C ».
    Le technicien qui a réalisé le diagnostic m’a expliqué qu’un coefficient de correction (>1) était appliqué pour l’énergie électrique, pour tenir compte des pertes de production et de transport !!!
    Mes logements sont équipés de double vitrage et tous les murs donnant sur l’extérieur ont été isolés par un doublage intérieur (10 cm de polystyrène + 1cm de placoplâtre).

Retour en haut