Encadrement des loyers : vers une généralisation dans toute la France ?

Alors que l’expérimentation actuelle doit s’achever en 2026, un rapport parlementaire relance le débat sur l’encadrement des loyers en France. A-t-il porté ses fruits ? Doit-on le continuer ? Les auteurs semblent avoir un avis déjà tranché.

🏙️ Un dispositif encore expérimental mais déjà étendu

Mis en place à titre expérimental depuis 2019, l’encadrement des loyers concerne aujourd’hui 72 collectivités, dont Paris, Lyon, Lille et Montpellier. Initialement prévu jusqu’en novembre 2026, le dispositif pourrait bientôt devenir permanent.

Dans un rapport remis le 24 septembre 2025 par les députés Annaïg Le Meur (Ensemble pour la République) et Iñaki Echaniz (PS), les parlementaires recommandent non seulement de pérenniser le système, mais aussi de l’étendre à toutes les communes en zone tendue et à leurs voisines, sur la base du volontariat, tout en leur laissant la possibilité d’y mettre fin si elles le souhaitent.

📊 Quels résultats sur les loyers ?

Selon l’Atelier parisien d’urbanisme (APUR), les premiers résultats sont déjà visibles : à Paris, le loyer moyen observé entre juillet 2023 et juin 2024 était 8,2 % inférieur à ce qu’il aurait été sans encadrement. Le but du dispositif n’étant pas de faire baisser les loyers, mais bien de freiner leur envolée.

Les députés insistent sur un point qui cristallise souvent la critique : selon eux, l’encadrement n’explique pas la baisse de l’offre locative constatée dans certaines villes. Celle-ci touche aussi des communes non concernées par le dispositif. En clair, le lien entre encadrement et raréfaction des biens à louer n’est pas établi.

📌 Quelles propositions pour l’avenir du dispositif ?

Le rapport ne se contente pas de recommander la généralisation : il propose une vingtaine de mesures pour renforcer et clarifier l’encadrement des loyers.

– Procédure simplifiée pour les communes

Actuellement, l’application du dispositif passe par une procédure complexe, centralisée, et souvent lente. Le rapport recommande de donner aux communes éligibles un pouvoir de décision directe, en lien avec leur intercommunalité (EPCI), et de supprimer l’étape du décret ministériel. Cela éviterait des délais de plusieurs années.

– Un meilleur calcul du loyer de référence

Le loyer de référence est aujourd’hui calculé par des observatoires locaux, mais plusieurs points sont à améliorer :

  • Supprimer le critère d’époque de construction, peu pertinent.
  • Renforcer la transmission des données par les professionnels pour plus de fiabilité.
  • Valoriser les surfaces non habitables (terrasses, caves…) via un coefficient officiel, plutôt que par des compléments de loyer libres.

– Mieux encadrer le complément de loyer

Le complément de loyer permet aujourd’hui de dépasser le plafond si le logement présente des « caractéristiques exceptionnelles », mais sans cadre clair. Le rapport propose :

  • Une régulation chiffrée et objective des compléments,
  • Une publication de la jurisprudence existante pour aider bailleurs et locataires,
  • Une obligation de justification du complément dès l’annonce immobilière.

Autre nouveauté : permettre une revalorisation du loyer après travaux, même en cas d’encadrement, si le locataire est d’accord. Aujourd’hui, cela est interdit, ce qui freine les rénovations.

– Lutter contre les contournements

Plusieurs pratiques échappent au cadre actuel :

  • Baux civils utilisés pour des résidences principales,
  • Colocation avec des baux multiples difficiles à contrôler,
  • Coliving où les charges masquent des loyers gonflés.

Le rapport propose une meilleure transparence des contrats, un calcul clair des loyers en colocation, et des droits renforcés pour les locataires, quel que soit le type de bail.

– Plus de droits pour les locataires… et plus de clarté pour les bailleurs

Les auteurs du rapport souhaitent simplifier les recours : une seule procédure de contestation, valable à tout moment, pour le loyer de base ou le complément. En échange, ils proposent :

  • Un raccourcissement du délai de contestation de 3 ans à 1 an,
  • Une protection renforcée du locataire contre les congés abusifs s’il entame une procédure,
  • Une meilleure sécurité juridique pour les bailleurs, grâce à des règles plus lisibles.

Une proposition de loi pourrait être déposée prochainement pour formaliser ces évolutions.

🧭 Et maintenant ?

Le rapport a été commandé par l’ancienne ministre du Logement Valérie Létard, avant sa démission. Une autre étude indépendante est attendue d’ici novembre, confiée par Matignon à deux chercheurs, Gabrielle Fack et Guillaume Chapelle. Le ou la prochain(e) ministre devra trancher, en tenant compte des conclusions de ces deux rapports.

Manuel Domergue, directeur des études de la Fondation Abbé Pierre, ainsi que d’autres associations et défenseurs du droit au logement, saluent un rapport “bipartisan” qui pourrait représenter une avancée majeure pour les locataires confrontés à des loyers trop élevés.


Sources :
Synthèse de la mission d’information
Le Figaro

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