Encadrement des loyers suspendu à Lyon : quelles conséquences pour les bailleurs ?

Le tribunal administratif de Lyon a annulé, le 14 octobre 2025, l’arrêté préfectoral fixant les loyers encadrés à Lyon et Villeurbanne pour la période 2023–2024. Un revirement juridique qui interroge autant qu’il soulage certains propriétaires, notamment ceux qui avaient reçu une amende sur cette base. Retour sur une décision qui rebat les cartes.

⚖️ Une annulation sur la forme, pas sur le fond

Le 29 septembre 2023, la préfète du Rhône avait pris un arrêté déterminant les loyers de référence à appliquer dès le 1er novembre 2023, dans le cadre de l’encadrement des loyers instauré à Lyon et Villeurbanne depuis 2021. Ce texte fixait, selon cinq secteurs géographiques, un loyer de référence, un loyer majoré et un loyer minoré, calculés en euros par mètre carré.

Mais plusieurs organisations de propriétaires (UNPI 69, UNIS, FNAIM, SNPI) ont déposé un recours. Leur principal argument : l’arrêté était illisible, en raison de la carte annexée, jugée trop vague pour permettre aux bailleurs de s’y retrouver précisément.

Le tribunal leur a donné raison. Dans sa décision rendue le 14 octobre 2025, il souligne que la carte ne permettait pas d’identifier clairement les limites des secteurs. Cette imprécision constitue une atteinte au principe de clarté et d’intelligibilité de la norme, qui a valeur constitutionnelle. L’arrêté est donc annulé dans son intégralité, et l’État devra verser 1 500 euros aux organisations de propriétaires requérantes. À noter que le fond du dispositif n’est pas remis en cause, le vice de forme étant jugé suffisant pour justifier l’annulation.

🚫 Une suspension temporaire

L’annulation de l’arrêté du 29 septembre 2023 entraîne une suspension rétroactive du dispositif pour la période du 1er novembre 2023 au 31 octobre 2024. Pendant cette période, aucun texte encadrant les loyers n’était légalement applicable à Lyon et Villeurbanne.

Mais contrairement à certaines interprétations, le dispositif n’a pas été suspendu plus longtemps. En effet, un nouvel arrêté préfectoral a été publié le 22 octobre 2024, entrant en vigueur dès le 1er novembre 2024. Celui-ci fixe une nouvelle grille de loyers de référence valable jusqu’au 31 octobre 2025. Cet arrêté n’est pas concerné par la décision du tribunal et s’applique donc pleinement aujourd’hui.

📌 Qu’est-ce que ça change pour les propriétaires ?

Cette décision a des conséquences concrètes pour les bailleurs. Ceux qui ont respecté scrupuleusement les plafonds imposés par l’arrêté annulé peuvent estimer avoir appliqué une règle aujourd’hui caduque. À l’inverse, ceux qui ont dépassé les loyers de référence majorés ne peuvent plus être sanctionnés pour cette période, puisque le texte sur lequel reposait toute sanction a été annulé.

Plus sensible encore, la question des amendes déjà infligées se pose. Si un propriétaire a été sanctionné pour avoir pratiqué un loyer jugé trop élevé entre novembre 2023 et octobre 2024, il est désormais en droit de contester cette amende. L’annulation du fondement légal rend cette sanction difficilement défendable.

Pour l’heure, l’encadrement des loyers est de nouveau applicable depuis le 1er novembre 2024, sur la base du nouvel arrêté. Il est donc essentiel pour les bailleurs de se référer à la grille en vigueur et de vérifier la période concernée avant toute décision.

🔍 Que faire maintenant ?

L’arrêté de 2023 n’a plus de valeur juridique. Cela signifie que toute obligation ou sanction fondée sur cet arrêté ne peut plus être justifiée. Si un bail a été signé entre novembre 2023 et octobre 2024 en respectant scrupuleusement les plafonds fixés par ce texte, le propriétaire n’était en réalité pas tenu légalement de s’y conformer, même si cela lui avait été présenté comme obligatoire à l’époque.

De même, si une amende a été infligée pour dépassement du loyer de référence pendant cette période, il est désormais possible d’en demander l’annulation, voire le remboursement, puisque la base réglementaire sur laquelle elle repose a été annulée par le tribunal. Pour cela, commencer par adresser une réclamation à l’autorité administrative qui a prononcé l’amende, et si besoin engager un recours devant le tribunal administratif.

Une indemnisation est-elle envisageable ?

Pour ceux qui espèrent éventuellement obtenir une indemnisation parce qu’ils ont appliqué un loyer plus bas que ce qu’ils auraient pu pratiquer librement, les chances sont très limitées. Le simple fait d’avoir respecté un arrêté ultérieurement annulé ne suffit pas à engager la responsabilité de l’État, sauf à démontrer un préjudice direct et anormal, ce qui est rarement reconnu en pratique. En clair, il est peu probable que les bailleurs puissent obtenir un dédommagement simplement pour avoir « perdu » des loyers sur cette base.

Il est également conseillé de rester attentif à la publication du nouvel arrêté préfectoral, annoncé par la préfecture pour début novembre 2025. Cette nouvelle version devra corriger les défauts relevés par le tribunal afin de permettre une application claire et juridiquement sécurisée du dispositif.

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