L’encadrement des loyers est-il efficace ? Cette nouvelle étude embarrasse l’État

L’encadrement des loyers, cette fameuse mesure de la loi Elan qui fixe un loyer plafond notamment dans des métropoles comme Paris, Lille, Lyon, Bordeaux, Montpellier ou le Pays Basque, est sur la sellette.

L’objectif affiché est louable : protéger le pouvoir d’achat des locataires face à des hausses jugées excessives. Cependant, pour les propriétaires-bailleurs, cette mesure est source de vives inquiétudes. Elle est souvent perçue comme un frein à l’investissement, car elle réduit la rentabilité potentielle des biens et, in fine, risque d’assécher le parc locatif en incitant certains à vendre ou à ne plus entretenir leurs logements.

Alors que le gouvernement réfléchit à la pérennisation du dispositif au-delà de 2026 et à son extension à de nouvelles agglomérations, l’heure est au bilan. Et c’est là qu’une récente étude du marché locatif français, menée par CLAMEUR, vient bousculer certaines opinions

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🔎 Quelle méthodologie a été retenue ?

Pour trancher le débat sur l’efficacité de l’encadrement, l’étude CLAMEUR a choisi d’adopter une approche scientifique ultra-rigoureuse. Elle a délaissé les chiffres théoriques des annonces pour se concentrer sur les données des baux de location réellement signés. L’analyse porte donc sur ce qui est effectivement payé par les locataires.

Le secret de l’analyse : la « double-différence »

Pour une évaluation impartiale, les chercheurs ont utilisé l’outil le plus pointu de l’économétrie pour ce type d’évaluation : l’analyse en « doubles différences » (Difference-in-Differences).

Le principe est un exercice de comparaison en deux temps, cherchant à isoler l’effet pur de la loi :

  1. Première différence (dans le temps) : On compare l’évolution des loyers avant la mise en place de l’encadrement et après dans les villes qui l’appliquent (Lille, Lyon, le « groupe traité »).
  2. Seconde différence (dans l’espace) : On compare cette évolution avec celle de villes similaires (même dynamisme économique, même typologie de biens, etc.) qui n’ont, elles, pas mis en place l’encadrement (le « groupe témoin »).

Le raisonnement est le suivant : si la loi fonctionne, la différence d’évolution entre le groupe traité et le groupe témoin devrait être significative après l’encadrement. Ce serait la preuve que l’intervention législative a ralenti les loyers.

📉 Le constat : un effet « nul » sur le loyer

L’étude a passé au crible les évolutions enregistrées notamment à Lille et Lyon, villes pionnières de l’encadrement.

Le résultat des courses est tout simplement surprenant : Selon cette analyse, le différentiel d’évolution des prix dans les zones encadrées (Lille et Lyon) comparée aux autres zones est resté quasiment stable, autour de 0% après la mise en application de l’encadrement des loyers.

En clair : lorsque les chercheurs ont soustrait l’évolution des loyers du groupe témoin de celle du groupe traité, le résultat est proche de zéro. L’évolution des loyers n’a donc pas été significativement différente de ce qu’elle aurait été sans la réglementation. Cela implique que si les loyers ont pu se stabiliser, c’est grâce à des facteurs économiques généraux (changement d’offre, d’activité, etc.) qui ont touché aussi bien les villes encadrées que les autres, et non pas grâce à l’intervention directe de la loi.

La conclusion de CLAMEUR est sans ambiguïté : l’encadrement n’aurait eu « aucun effet sur les loyers » dans ces zones. 

Étude sur l'efficacité de l'encadrement des loyers (source : Clameur)
Si l’encadrement avait été efficace, les points rouges devraient se trouver davantage sous la barre des 0 %.

📣 Des rapports contradictoires qui compliquent la prise de décision

L’expérimentation de l’encadrement des loyers doit théoriquement prendre fin en novembre 2026, et l’heure est à la décision politique.

Le gouvernement lui-même a lancé une mission d’évaluation officielle du dispositif, dont les conclusions sont attendues pour décider de sa pérennisation et de son extension à de nouvelles agglomérations. Parallèlement, un rapport parlementaire très commenté (dit « Echaniz – Le Meur ») a déjà rendu ses conclusions, affirmant, au contraire, l’utilité de la mesure pour éviter les « loyers excessifs » et préconisant son élargissement (nous en avions parlé ici).

C’est précisément dans ce contexte d’évaluation et d’intenses pressions politiques que l’étude de CLAMEUR vient jeter un véritable pavé dans la mare.

Si l’approche en « double-différence » — considérée comme la plus solide pour mesurer l’impact réel d’une politique publique — conclut à un effet nul sur les loyers signés dans des villes historiques du dispositif, elle pose une question fondamentale : pourquoi étendre massivement un outil qui n’atteint pas son objectif principal, tout en risquant de décourager l’investissement locatif privé ?

Affaire à suivre…


Source : L’état des lieux du marché locatif privé – Novembre 2025 – Clameur
Crédit image en-tête : Freepik

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