Une situation pour le moins originale se développe à Paris depuis le début de l’année : des locataires aisés de HLM « de luxe » protestent contre le conventionnement de leur immeuble, ce qui les oblige à payer un surloyer souvent dissuasif. Mais s’ils partent, la mixité sociale risque d’en pâtir.

Principe du Supplément de Loyer de Solidarité

Le supplément de loyer de solidarité (SLS), ou « surloyer » est une somme qui peut être réclamée au locataire d’un logement social conventionné en plus de son loyer, dès lors que ses revenus excèdent de 20 % les plafonds de ressources. Il est calculé en fonction de la surface habitable, du coefficient de dépassement, et d’un montant au m² fixé par la loi selon la zone géographique (le « Supplément de loyer de référence »).

D’où vient la polémique à Paris ?

Le problème est que certains locataires parisiens habitent des appartements obtenus en tant que cadre via le 1 % patronal : des logements intermédiaires et dits « à loyer libre » (en réalité des loyers très faibles), construits principalement avec de l’argent public, et attribués par complaisance pendant les années Chirac et Tiberi. Et depuis quelques années, cette situation choque l’opinion publique : une conseillère de Paris avait ainsi été épinglée fin 2017 pour occuper depuis 2003 un 83 m² dans le 20ème arrondissement contre un loyer de seulement 1.300 €. Soit environ 1.000 € de moins que ce qu’il coûterait dans le privé.

Avec la loi SRU qui oblige les grandes villes à avoir au moins 25 % de logements sociaux, Paris convertit à tour de bras des immeubles pour espérer atteindre ce chiffre d’ici 2025 (on en compte environ 20 % aujourd’hui). Ces « HLM dorés » se font ainsi conventionner pour pouvoir être comptabilisés comme de vrais logements sociaux. Bien évidemment, ce conventionnement impose de contrôler les revenus des locataires pour vérifier qu’ils respectent les plafonds, sans quoi le bailleur peut leur appliquer le supplément de loyer de solidarité.

A Paris, environ 1.500 locataires seraient ainsi concernés par ce revirement de situation. Un chiffre à relativiser toutefois : le parc HLM de la ville de Paris compte au total 211.600 logements.

La mixité sociale en danger ?

Ces locataires visés par le SLS ont monté un comité de défense fin janvier, renforcé par des avocats, pour interpeller les autorités et protester contre ces hausses de loyer. Pour certains, elles dépassent les 2.000 €, soit au final un loyer plus cher que dans le privé. Des élus les ont rejoint dans leur combat, comme par exemple les maires du 13e et du 5e arrondissement, afin de dénoncer ce conventionnement qui a « un effet pervers sur la mixité sociale ». Et qu’au final, « il vise à exclure les classes moyennes de Paris ». La mairie de Paris, elle, se dit bien impuissante : il s’agit d’une disposition légale renforcée par les lois Elan et Egalité et Citoyenneté, qui s’impose donc à tous.

D’après l’Insee, en 30 ans (de 1984 à 2013), la part des ménages appartenant aux 25% les plus riches dans les HLM est passée de 12,6 % à 5 %. Pour les bailleurs sociaux, cela représente une perte importante de revenus ; pour les habitants, cette baisse de mixité sociale se traduit parfois par une dégradation des conditions de vie (nuisances, trafics, incivilités, …).

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