Depuis la parution de notre tribune sur le chaos politique en France et ses effets sur l’immobilier, de nombreux propriétaires-bailleurs nous ont partagé leurs opinions, leurs inquiétudes, leurs préoccupations. Des réactions, souvent très franches, qui traduisent une exaspération croissante face à un système qui les décourage de louer leurs logements. À travers leurs témoignages, c’est une crise de confiance qui s’exprime, révélatrice des difficultés auxquelles se heurte aujourd’hui le marché locatif.
Sommaire
- 💸 Une fiscalité jugée étouffante
- 🧱 Des normes énergétiques incomprises
- ⚖️ Une insécurité juridique qui décourage
- 🏚️ Quand l’État semble devenir le vrai propriétaire
- 🪫 Une lassitude croissante, parfois irréversible
- 💡 Des propositions concrètes, mais peu entendues
- 🧩 Le futur « statut du bailleur privé » arrivera-t-il à convaincre ?
💸 Une fiscalité jugée étouffante
C’est le premier grief évoqué par la plupart des bailleurs : la fiscalité, jugée confiscatoire et dissuasive.
Sylvain, propriétaire bailleur, nous confie : « 60 % des loyers de mes locataires sont en fait de l’impôt que reverse le propriétaire », regrettant que cette pression fiscale nuise aussi au pouvoir d’achat des locataires.
Un autre bailleur résume le malaise avec une formule choc : « Propriétaire = vache à lait taillable et corvéable à merci », écrit-il, avant de rappeler qu’il y a quelques décennies, les taxes et assurances représentaient deux mois de loyers… contre six aujourd’hui.
Certains dénoncent aussi l’impôt sur la fortune immobilière (IFI), accusé de freiner tout nouvel investissement. Joseph, par exemple, estime qu’« un investisseur privé ne prendra plus jamais le risque d’investir dans l’immobilier » tant que cet impôt subsistera.
Tous soulignent le même paradoxe : on réclame des logements aux bailleurs, tout en rendant leur activité moins rentable et plus risquée.
🧱 Des normes énergétiques incomprises
Autre motif de colère : les contraintes liées à la performance énergétique.
Beaucoup dénoncent des diagnostics de performance énergétique (DPE) jugés incohérents, voire erronés.
Un propriétaire évoque ainsi des « DPE pleins d’erreurs », réalisés sans contrôle sérieux, quand d’autres s’inquiètent des conséquences sur leurs baux. Il faut cependant souligner qu’entre temps, de nouvelles mesures visant à renforcer la fiabilité du DPE ont vu le jour.
Mais pour plusieurs propriétaires, le système frôle parfois l’absurde. L’un d’eux raconte qu’on lui a proposé « d’installer une pompe à chaleur à 46 000 € et de changer tous les vitrages à 2 000 € pièce » pour conserver la possibilité de louer — une somme largement supérieure à la rentabilité du bien.
Vincent, retraité, souligne quant à lui qu’« il est difficile de faire des travaux coûteux » quand les revenus locatifs sont modestes et les normes toujours plus contraignantes.
Résultat : des logements vides, des bailleurs lassés et une confiance fragilisée dans un dispositif censé inciter à la rénovation.
⚖️ Une insécurité juridique qui décourage
Les risques locatifs — impayés, squats, lenteur des procédures — restent une inquiétude majeure.
Philippe constate que « les locataires ont tous les droits » et que « rien ne protège les propriétaires contre les loyers impayés ».
André, lui, a fini par jeter l’éponge :
« Je ne loue plus suite aux nombreux problèmes d’impayés […] trois ans et une grosse somme perdue. »
Beaucoup jugent que le déséquilibre entre bailleurs et locataires s’est accentué, et que les procédures d’expulsion trop longues alimentent la peur de louer.
Yogya confie ainsi qu’elle privilégie désormais les locations meublées, simplement parce qu’elles offrent plus de flexibilité en cas de problème.
Ce sentiment d’insécurité s’ajoute à une instabilité juridique permanente, où les règles changent au gré des décrets, des jugements ou des calendriers politiques.
🏚️ Quand l’État semble devenir le vrai propriétaire
Derrière les plaintes fiscales et réglementaires, beaucoup disent ressentir une perte de contrôle sur leurs biens.
Certains parlent d’une forme de “tutelle” de l’État.
L’un d’eux résume ainsi sa colère :
« La mairie et l’État deviennent les réels propriétaires des biens et décident arbitrairement de ce que le possesseur pourra en faire. »
Plusieurs bailleurs estiment que les contraintes actuelles vont à l’encontre du droit de propriété, et qu’en décourageant les investisseurs, elles aggravent la pénurie de logements.
D’autres, comme Linarello, plaident pour une fiscalité différenciée :
« Les logements loués à long terme ne devraient pas entrer dans l’assiette de l’IFI. »
🪫 Une lassitude croissante, parfois irréversible
La colère laisse souvent place à la résignation. « Je ne relouerai que si les règles du jeu changent », tranche André.
D’autres vendent, ou laissent leurs logements vides.
Certains calculent même qu’ils gagneraient davantage en plaçant leur capital sur un compte rémunéré qu’en continuant à louer.
« Placement immobilier : de plus en plus de contraintes, de moins en moins d’intérêt. » résume un propriétaire.
Ce désengagement progressif menace directement l’offre locative privée, déjà fragilisée dans de nombreuses villes.
💡 Des propositions concrètes, mais peu entendues
Malgré leur lassitude, plusieurs bailleurs avancent des idées pour relancer la location privée :
- Sécuriser les loyers et accélérer les procédures d’expulsion.
- Alléger la fiscalité sur les locations longues.
- Encourager la rénovation par des avantages fiscaux plutôt que par la contrainte.
- Simplifier les démarches pour les petites copropriétés.
Autant de pistes pragmatiques qui traduisent un message clair : les propriétaires ne demandent pas des privilèges, mais des règles stables et justes pour continuer à loger les Français sans se ruiner.
🧩 Le futur « statut du bailleur privé » arrivera-t-il à convaincre ?
Face à cette lassitude croissante, le gouvernement évoque depuis plusieurs mois la création d’un statut du bailleur privé, censé mieux reconnaître et encadrer ce rôle clé dans le logement.
L’idée : offrir un cadre plus lisible, plus équitable et plus incitatif pour les particuliers qui mettent un bien en location.
Mais du côté des propriétaires, la méfiance reste palpable. L’un d’eux s’inquiète déjà d’« une nouvelle inégalité créée entre les bailleurs » si le dispositif ne bénéficie qu’aux nouveaux entrants.
Si ce futur statut veut convaincre, il devra répondre à l’essentiel : rétablir la confiance.
Autrement dit, reconnaître que les bailleurs privés ne doivent pas être vus comme des spéculateurs, mais comme des acteurs indispensables du logement en France.
Sans eux, aucune politique du logement — ni choc d’offre, ni plan de rénovation — ne pourra réellement fonctionner.
Autodidacte (et passionné) de droit immobilier, Licence pro E-commerce, je suis responsable éditorial, rédacteur, SEO et data analyst chez LocService.fr depuis plus de 10 ans. Je suis l’auteur des Observatoires LocService du marché locatif, et vous m’avez peut-être déjà entendu (ou pas, si vous dormiez encore) dans des matinales TV/radio pour les présenter.
Et en bon Breton qui se respecte, je suis facilement corruptible avec des crêpes !
